Les maladies et parasites des plantes carnivores
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Comme tous les autres végétaux, les plantes carnivores ne sont pas à l’abri des prédateurs, loin s’en faut ! Qu’ils soient animaux ou champignons, ceux-ci attaquent parfois de façon insidieuse et donnent du fil à retordre aux cultivateurs, même chevronnés. Cette article regroupe les cas les plus fréquents rencontré en culture.
Les insectes et autres phytophages
Les pucerons
Bien connus de tous ceux qui côtoient les plantes, ils se retrouvent souvent en grand nombre si aucune mesure n’est prise pour endiguer leur reproduction. Ils forment alors de véritables colonies. Ils se fixent préférentiellement sur les parties jeunes, plus tendres et riches en sève. Les bourgeons, jeunes tiges et hampes florales sont donc des cibles privilégiées. En conséquence, c’est toute la croissance des parties atteintes qui est affectée, et il en résulte des déformations et des trous. La plante exotique perd peu à peu son énergie.
Parmi les plantes carnivores, celles dont les tissus sont suffisamment tendres constituent des terrains favorables pour les pucerons : Byblis, Dionaea, Drosera, Drosophyllum et Pinguiculasont les plus exposées. Les Sarracenia peuvent être parasités, mais dans une moindre mesure, étant donné que leurs tissus se solidifient rapidement. Les pucerons peuvent également piquer les hampes florales des Genlisea et Utricularia.
Les pucerons sévissent surtout au printemps, mais on peut en apercevoir toute l’année tant qu’il ne gèle pas. Placés au cœur des rosettes des plantes, il n’est pas toujours aisé de les déceler. Des malformations sur les nouvelles pousses sont le signe de leur présence. À ce stade, il faut les éliminer.
Traitement
Si leur nombre est limité, et que les jeunes pousses ne semblent pas affectées, optez pour un retrait manuel avec un coton-tige humide. Cette méthode est indiquée en cas de présence faible et récente, quand les pucerons n’ont pas eu le temps de pondre leurs œufs.
Si la plante semble affectée ou que l’attaque est de grande ampleur (sur plusieurs de vos spécimens), il faut utiliser un anti-pucerons biologique systémique (qui passe par les tissus végétaux pour empoisonner les parasites), que l’on trouve facilement dans le commerce. Évitez les produits de type « traitement total », trop agressifs, et respectez scrupuleusement les doses indiquées. Renouvelez le traitement au bout de quelques jours si nécessaire, après éclosion des œufs, car ceux-ci ne sont pas atteints par ces produits.
Si vous ne voulez pas avoir recours aux produits chimiques et que la taille de votre pot vous le permet, immergez intégralement la plante dans de l’eau pendant 24 heures. Cela n’aura aucune incidence sur sa santé et va la débarrasser des pucerons de façon radicale.
L’élevage ou l'achat de larves de coccinelles est une solution intéressante. Elles dévorent volontiers les pucerons.
Les Cochenilles
Malgré leur nom commun, elles n’ont rien à voir avec les chenilles. À la manière des pucerons, ce sont des insectes piqueurs-suceurs, autrefois appelés « poux des plantes » en raison de leur caractère coriace. Les cochenilles à carapace se retrouvent plus souvent sur Darlingtonia californica, Nepenthes et Sarracenia et dans une moindre mesure, Brocchinia et Catopsispeuvent également être atteints. Les cochenilles farineuses sont les plus redoutables, car leurs attaques se situent souvent au cœur des plantes. Difficiles à éliminer en totalité, elles sont particulièrement coriaces car protégées par leurs sécrétions filamenteuses. Les rhizomes des Sarracenia sont particulièrement enclins à se faire parasiter par les cochenilles farineuses. Les cochenilles attaquent au printemps et en été. La présence de tâches blanchâtres, cotonneuses, sur la base du feuillage, indique que la plante est infestée par des cochenilles farineuses. Les autres forment des « spots » faciles à déceler.
Traitement
S’il s’agit de cochenilles à carapace et qu’elles sont peu nombreuses, vous pouvez les éliminer en grattant les parties atteintes à l’aide d’un cure-dent.
En cas d’attaques persistantes, pulvérisez une solution liquide composée d’eau et de savon noir.
En cas d’attaque de cochenilles farineuses, commencez par éloigner les plantes atteintes des plante saines, autant que possible.
Coupez systématiquement les parties atteintes. Jetez-les dans une poubelle ou brûlez-les.
Sur le reste de la plante, utilisez un anti-cochenilles systémique de préférence biologique, que vous prendrez soin d’utiliser en respectant scrupuleusement les doses indiquées. L’élimination totale et radicale des cochenilles, notamment farineuses, ne peut être effective qu’en mettant la plante racines nues, et en la trempant dans un seau d’eau mélangée avec le produit, pendant 24h.
Acariens
Les acariens sont de petits Arachnides suceurs parfois invisibles à l’œil nu. Ceux qui attaquent les espèces végétales sont communément appelés « araignées rouges ». Pour autant, ce ne sont pas des araignées à proprement parler, et de surcroît, ils sont souvent jaunes. Parmi ces « araignées rouges », l’acarien qui nous intéresse est le tétranyque tisserand. Ses attaques sont bien souvent discrètes, et sur les plantes carnivores, il cause moins de dommages que les pucerons. Ses attaques sont favorisée par un temps chaud et sec.
Traitement
Douchez abondamment la plante, de préférence le soir. Le tétranyque tisserand déteste l’humidité.
Si les attaques persistent, procurez-vous un acaricide spécial « araignées rouges ». Les produits à base de dicofol sont les plus efficaces car leur potentiel d’action va de l’œuf à l’adulte.
Aleurodes
Les aleurodes se trouveront le plus souvent chez les plantes à mucilage telles que les Drosera, Drosophyllum, Ibicella lutea et Proboscidea louisianica. Ce n’est pas sans risques pour les aleurodes elles-mêmes, toujours susceptibles de se faire capturer par les plantes qu’elles attaquent. Les feuilles attaquées deviennent grasses et susceptibles d’être recouvertes de fumagine.
En climat tempéré, les aleurodes prospèrent principalement dans des lieux où le climat est contrôlé, typiquement les serres. Elles sont beaucoup moins fréquentes en culture à l’extérieur, et plus faciles à éliminer.
Traitement
Pulvérisez une solution liquide composée d’eau et de savon de Marseille fortement dilué.
Le recours à des produits spécialisés n’est pas conseillé en raison de l’adaptation des aleurodes à ces produits, et de l’action phytotoxique qu’ils peuvent avoir sur les végétaux traités.
Chenilles, limaces, escargots…
Ce sont des phytophages connus de tous, qui n’épargnent pas nos plantes carnivores. Attaquant principalement au printemps et en été et de nuit, leur consommation peut faire disparaître une jeune pousse en un seul repas. Leur passage laisse des traces évidentes, comme des feuilles dévorées partiellement ou totalement, des traces de mucus pour les gastéropodes et des excréments. Les Sarracenia et Pinguicula sont également des cibles potentiels pour ces nuisibles : Leur feuillage tendre et leur placement à ras du sol en font des mets de premier choix. Curieusement, les limaces et les escargots ne mangent jamais les dionées, mais se retrouvent parfois coincés dans leurs pièges. La chenille appelé « ver gris » est particulièrement dérangeante car elle attaque sous terre.
Traitement
Traquez-les ! Retirez-les manuellement le soir venu ou en début de nuit…
Surfacez votre pot avec du sable de quartz. Dur et coupant, il dissuadera les gastéropodes de s’aventurer sur le territoire de votre plante ! Un tel surfaçage permet également d’éviter les projection de tourbe blonde quand il pleut et lors des arrosages, ainsi que de limiter la chauffe de la tourbe en cas de températures élevées.
Utilisez un anti-limaces contenant un répulsif pour les animaux de compagnie (Bitrex). Le produit se présente généralement sous forme de granulés, à répartir avec parcimonie autour du pot (et non pas sur le substrat lui-même). Au bout de quelques jours, retirez les granulés pourris ou endommagés qui n’auront pas été consommés.
Utilisez un insecticide anti-chenilles. Ceux-ci sont efficaces sur les sujets jeunes mais beaucoup moins sur les adultes. Pour lutter contre les chenilles souterraines, arrosez fréquemment.
Les champignons et autre micro-organismes
Fumagine
Elle est causée par un champignon qui donne l’impression que les feuilles sont couvertes d’une poudre grisâtre ou noirâtre. Plutôt bénigne en elle-même, elle est néanmoins souvent le signe d’une fragilité causée par une attaque plus grave (présence de pucerons ou cochenilles par exemple). Le champignon responsable de la fumagine a en effet tendance à se développer sur leurs excréments. Si elle est présente de façon périodique et sur de petites surfaces, la gêne n’est que d’ordre esthétique. En revanche, si elle a tendance à se répandre, cela peut entraver la photosynthèse et donc la croissance de la plante, voire l’asphyxier. Les plantes du genre sarracenia et nepenthes sont de loin les plus sujettes à la fumagine, et ce en toutes saisons, mais son développement est favorisé lors des périodes sombres et humides.
Traitement
En cas d’attaque de faible envergure, nettoyez la partie atteinte avec un coton imbibé d’alcool à brûler fortement dilué dans de l’eau.
Coupez les feuilles atteintes.
Déterminez l’origine de sa présence en identifiant le parasite responsable et traitez en conséquence.
Botrytis
L’espèce Botrytis cinerea est celle qui nous intéresse. C’est un champignon redoutable susceptible d’attaquer toutes les parties d’une plante, à tous les stades de croissance et qu’elles soient vivantes ou mortes. Il engendre une nécrose fulgurante, profonde, avec en surface une couche de spores grise plus ou moins épaisse (d’où son nom de « pourriture grise »), ne laissant aucun doute sur la nature de la maladie. Comme beaucoup d’autres champignons, son développement est favorisé par une humidité élevée, un manque d’aération et une lumière faible. Dans nos cultures de plantes carnivores, il affecte donc souvent les plantes cultivées en terrarium ou en serre, mais peut aussi se rencontrer à l’extérieur quand le temps est durablement humide. Cephalotus follicularis y est particulièrement sensible, ainsi que les Drosera et les sarracenia. Les rhizomes de ces derniers en sont souvent victimes en hiver si le substrat est resté trop humide.
Traitement
En prévention, aérez régulièrement vos cultures et veillez à leur apporter suffisamment de lumière. Si une plante est atteinte, éloignez-la des autres au plus vite.
Une méthode sans produits consiste à mettre la plante entièrement à nu, couper et jeter ou brûler les parties mortes, la nettoyer soigneusement à l’eau (enlever toute trace de tourbe blonde) et la replanter dans un nouveau pot avec un substrat neuf. Cette méthode n’est efficace qu’au début de l’infection.
Sinon, utilisez un fongicide, sans surdoser. Alternez les produits, de façon à ce que le champignon ne puisse pas s’accommoder à une molécule en particulier. Cherchez un produit contenant de l’imidaclopride, de l’aliette ou du bénomyl. Supprimez toujours les parties mortes. Faire tremper la plante dans le produit dilué à l’eau peut lui être salutaire.
Il semblerait que le cuivre soit toxique pour B. cinerea. Essayez alors de placer un élément en cuivre à proximité.
Oïdium
Oïdium est le nom générique donné à une maladie causée par plusieurs champignons dont l’action donne un résultat similaire, à savoir une moisissure blanchâtre semblable à de la farine, qui recouvre le feuillage des plantes (notamment les parties jeunes). Cette moisissure particulièrement « contagieuse ». Elle prolifère préférentiellement par temps chaud et humide, et son développement est favorisé par des écarts de température entre le jour et la nuit. C’est donc au printemps et à la fin de l’été qu’on constate le plus d’attaques. À noter que l’oïdium est plus fréquent dans le sud de la France, dans une zone allant de l’Aquitaine au sud des Alpes en passant par les zones côtières de la Méditerranée, très exposées, à l’exception des Alpes-Maritimes. Les Sarracenia, Nepenthes et surtout Cephalotus follicularis sont les hôtes les plus communes.
Traitement
Si vous vous trouvez dans une région à risque, évitez d’arroser le feuillage lorsqu’il fait chaud, et dégagez rapidement la plante de ses feuilles mortes pour que l’humidité ne s’y concentre pas.
Si une plante est atteinte, éloignez-la des autres au plus vite.
Coupez et débarrassez-vous des parties mortes, puis utilisez un fongicide systémique contenant du propiconazole ou du myclobutanil aux doses indiquées. Les produits indiqués contre la « maladie des rosiers » conviennent.
Pythium
Le pythium est un micro-organisme semblable à un champignon. Il est responsable de ce qui est appelé « fonte des semis », c’est-à-dire la nécrose des très jeunes plants à peine germés ou en cours de germination, et pire, le pourrissement des racines des plantes. Le caractère foudroyant des attaques de pythium complique sensiblement les soins, d’autant plus que ce sont les parties souterraines qui sont touchées. Les effets se voient bien souvent quand il est trop tard pour sauver l’intégralité de la plante : les feuilles, privées d’eau, se ramollissent et se dessèchent depuis leur partie supérieure. Si rien n’est fait, une plante adulte peut sécher en quelques jours. L’apparition de ce micro-organisme est causée par un excès d’humidité. Il est parfois déjà présent dans l’eau d’arrosage. Toutes les plantes carnivores peuvent être attaquées, mais les Sarracenia sont les plus susceptibles de l’être.
Traitement
En prévention, aérez régulièrement et vérifiez que l’eau d’arrosage utilisée est saine et n’a pas stagné trop longtemps.
Traitez le plus rapidement possible avec un anti-pythium du commerce (demandez conseil) en respectant les indications.
Si les feuilles sont déjà sévèrement atteintes, dépotez la plante, coupez les racines atteintes (reconnaissables à leur couleur orangée), pulvérisez de l’anti-pythium et rempotez dans un substrat neuf.
Phytophthora
Le genre Phytophthora comprend de nombreuses espèces de micro-organismes notamment responsables du fameux mildiou, une maladie destructrice. Les feuilles se couvrent de tâches orange à marron et finissent par sécher. Une plante atteinte, même très robuste, n’a que peu de chances d’y survivre. Heureusement, ses attaques ne sont pas très fréquentes chez les plantes carnivores. Son apparition peut être favorisée par un arrosage abondant du feuillage aux heures chaudes. Lutte La seule action véritablement efficace est préventive (avant l’apparition de la maladie) mais il est difficile de prévoir les attaques. Le cas échéant, dès les premières manifestations de sa présence, isolez la plante infectée, coupez et détruisez les parties atteintes, puis traitez à l’aliette, produit que l’on trouve dans le commerce. N’augmentez pas la dose car cela pourrait être fatal pour la plante.
Pour conclure… Les plantes carnivores peuvent donc subir les assauts de multiples parasites. Néanmoins, quand une plante ne semble pas se développer harmonieusement ou n’a pas un bel aspect, il faut avant tout s’interroger sur ses propres conditions de culture. Sinon, cela peut mener à des interventions inappropriées (traitement chimique, dépotage…) qu’il faut bien entendu éviter pour avoir une chance de garder sa plante en vie. En outre, tous les organismes qui se développent et vivent aux côtés des plantes ne sont pas forcément pathogènes, loin de là. Ainsi, rien ne sert de vouloir désintégrer la moindre « bestiole » qui se promène sur elles ! Quoi qu’il en soit, prendre le temps de mener une bonne réflexion évite les mauvaises surprises et les regrets !